Lorsque je contacte cette école, je suis loin de m'imaginer l'expérience que je vais vivre. Le lieu se trouve à l'extérieur de la petite ville d'Alta Gracia, loin de toute civilisation, sans électricité, ni bien entendu téléphone ou quelque connexion internet que ce soit. Une camionnette toute déglinguée m'attend en bas de la montagne où le bus m'a déposée. Jason, tout en grimpant le chemin escarpé et ponctué de plans d'eau que nous traversons en roulant, me met au parfum.

Ici vivent 70 personnes. Familles, vieux, jeunes, tous sont ici pour vivre l'expérience d'une vie communautaire. L'expérience a démarré il y a quatre ans. Sans dieux, ni maîtres, ils cherchent à vivre une vie plus proche de la nature, nourrie de liens fraternels avec les autres. Pour parvenir à maintenir une harmonie, ils font quotidiennement un travail sur eux, et obéissent à une certaine hygiène de vie.

L'alimentation est exclusivement vegan (ni viande, ni oeufs, ni lait, ni fromages) Ils ne consomment pas d'alcool, ni café, ni thé. Rien que des produits naturels, dont la plupart viennent de leur propre production. On ne peut pas non plus fumer à l'intérieur du terrain (de 36 hectares). Passé le premier stade d'envie de sauter de la camionnette et fuir à toutes jambes, puis celui du repli sur moi en attendant que ça passe (je m'étais engagée à rester 3 jours), je fis une très belle découverte.

Le terrain est traversé par une belle rivière agrémentée d'une cascade, fournissant aux habitants de l'eau pure à profusion pour boire et se laver, ainsi qu'un terrain de jeux et de baignades inégalable pour les enfants. Chevaux, vaches, chiens et chats viennent s'y abreuver, sans crainte d'approcher ces humains pas tout à fait comme les autres.

Les petites maisons sont faîtes de terre ou de bois. Leur construction constitue une grosse partie des activités quotidiennes des habitants, qui se réunissent en cercle sous un arbre chaque matin pour redéfinir les objectifs de la journée, les tâches de chacun et se donner du courage en se souhaitant une belle journée.

Afin que chaque famille puisse avoir sa maisonnette, le lieu invite des volontaires à venir les aider en échange de quoi ils apprennent les techniques de construction d'habitat écologique, sont nourris et vivent l'expérience de la communauté. Ils sont soumis aux même règles que quiconque en entrant sur le terrain, pas de tabac, d'alcool, de viande..pour ne pas modifier la saine énergie du lieu. Les jeunes volontaires que je rencontre passent plusieurs mois à Amatreya et ont l'air de s'éclater.

Fabrication des "briques" en paille et terre.

Une volontaire et la doyenne de la communauté, sous l'effet des betteraves crues je crois.

Et l'éducation des enfants dans tout ça? Me direz-vous. Elle est au coeur de tout. Prenant en compte l'Être Humain dans sa totalité. Chacun y prend part. Pendant trois mois, qu'ils appellent "intensifs", les enfants sont divisés en trois groupes, 3-6 ans, 6-12 ans et les adolescents. Chaque groupe a une maîtresse et les cours ont lieu sur de grandes tables en bois sous les arbres. Ils reçoivent là les bases de la connaissance.

Voici la table où a lieu le cours. Aujourd'hui, on parle des continents avec les 3-6 ans, mais là c'est la récré, et tout le monde est parti manger des mûres.

Le reste de l'année, que l'on nomme recréation, se déroule ainsi: chaque mois, les adultes décident des différents ateliers qui auront lieu chaque matin entre 9h et 13h30. Ce matin, couture pour les uns, cuisine pour les autres. Hier origami et apprendre à raconter des histoires. Cours de guitare et de flûte hébdomadaires. Jardinage. Les ateliers sont dispensés par les adultes résidents: parents, grands-parents, adolescents. Et les enfants choisissent chaque lundi leurs ateliers de la semaine.

Le reste de la journée, il faut souvent regarder en l'air pour trouver les enfants. Dans les branches des arbres. Ou dans la rivière. Chacun a une activité sportive par semaine en dehors de la communauté, en ville. Basket, tennis, danse, gym..selon leurs goûts. Ils vont aussi plusieurs fois par semaine en petits groupes en ville faire des recherches sur internet pour faire un travail sur les grands hommes qui ont changé le monde par exemple (Gandhi, Mandela..), ou une période de l'histoire.